vendredi, octobre 2

Nirvana et Samsara
















Que le Nirvana et le Samsara soient une seule et même chose, c’est là un fait touchant la nature de l’Univers ; c’est un fait dont ne peuvent se rendre compte pleinement et que ne peuvent éprouver par expérience directe que les âmes fort avancées en spiritualité. Que des gens ordinaires, convenables et non régénérés, acceptent cette vérité par ouï-dire, c’est simplement pour eux aller au devant d’un désastre…

La nature et la grâce, le Samsara et le Nirvana, la mort perpétuelle et l’éternité ne sont réellement et par expérience une même chose que pour les personnes qui ont rempli certaines conditions.
Les Evangiles sont parfaitement nets quant au processus par lequel seul un être humain peut gagner le droit de vivre dans le monde comme s’il y était chez lui : il faut qu’il fasse un renoncement total au moi, qu’il se soumette à une mortification complète et absolue…

L’histoire n’a pas gardé trace que quiconque soit jamais parvenu à la sainteté ni à l’illumination qui ne se soit, dès le début, conduit comme si l’évanescent et l’éternité, la nature et la grâce, étaient profondément différents et, par bien des côtés, incompatibles.
Le chemin de la spiritualité est une arête de couteau entre deux abîmes…

Il faut qu’il y ait conversion, soudaine ou non, non pas simplement du cœur, mais également des sens et de l’esprit qui perçoit. C’est dans les descriptions hindoues et extreme-orientales de la Philosophia Perennis que ce sujet est le plus systématiquement traité.
Ce qui est prescrit, c’est « une révulsion » plus ou moins soudaine et complète de la conscience, et la venue à la connaissance d’un état de « non-esprit » qu’on peut décrire comme la libération d’avec l’attachement perceptuel au principe du moi.

Pour y parvenir, il faut marcher délicatement et, pour s’y maintenir, il faut apprendre à unir la vigilance la plus intense à une passivité calme et négatrice du moi — la détermination la plus indomptable à une soumission parfaite aux directives de l’esprit.

« Si un œil ne s’endort jamais,
tous les rêves cesseront d’eux-mêmes ;
si l’Esprit garde son absolu,
les dix mille choses seront d’une seule substance. »
(le Troisième Patriarche du Zen)

Aldous Huxley la Philosophie éternelle